Ce dimanche 21 juin, c’est la Fête des Pères. Vous n’alliez tout de même pas oublier votre géniteur, votre paternel, votre daddy-ho!?! Je profiterai donc de cette rare occasion pour célébrer brièvement les joies de la paternité et dédierai le prochain extrait à mon père, René, celui qui a su déteindre efficacement sur ma personnalité depuis 34 ans et avec qui je partage plusieurs passions pour notre passé culturel. Pour toi, papa…
A priori, le nom de Paul Gauthier n’éveillera probablement pas de souvenirs tangibles. Dans les années 60, sa carrière évoluait déjà dans l’ombre de son frère, le célèbre chansonnier Claude Gauthier. L’homme emprunterait néanmoins des avenues similaires à ce dernier. Comédien avant tout, il a joué dans plusieurs longs métrages dont Entre la mer et l’eau douce (avec son frère, Geneviève Bujold et Robert Charlebois) en 1967, puis Red, Deux Femmes en or, Les Mâles et -mon préféré- Parlez-nous d’amour en 1976.
À la fin des années 60, Paul Gauthier caressait toutefois un projet différent: un hommage poétique aux mères et aux pères de ce monde. Deux étiquettes de disque différentes (RCA et Trans-Canada) approuvèrent le concept et commandèrent au comédien deux albums différents: Hommage à une mère (Trans-Canada) ainsi que Pour toi, mon père (RCA). Les deux albums offrent plusieurs témoignages poétisés, dans le style spoken word avec un accompagnement minimal à l’orgue. Certaiement pas de quoi fouetter un chat… Sur l’un comme sur l’autre, le débit de Gauthier est lent, le propos plutôt lourd et l’hommage, somme toutes, mièvre et redondant. Il faudrait toutefois patienter jusqu’à la publication de son hommage paternel pour retrouver le comédien cette fois-ci exalté et joyeusement naïf, prêt à dynamiser son approche. Et comment! En explorant toutes les facettes de la relation père-fils, Gauthier imagine une scène improbable et donnant lieu à tous les excès: Mon père dans une discothèque.
En empruntant à outrance un slang hippie qui ne semble même plus de son âge, Gauthier personnifie un fils qui convainc son père de vivre aux rythmes de sa jeunesse et de sa marginalité. Une soirée au bar le Prof Maboul (propriété de Pierre Marcotte et du chanteur Joël Denis) se transforme en un véritable cours en accéléré à propos de l’éphémère génération psychédélique! On discute d’amour, de drogues (beaucoup de drogues), de liberté et d’autres utopies. Totalement dans l’air du temps! Père et fils se rapprochent à mesure que la scène évolue, bien que Gauthier ne soit l’unique (et éreintant) monologuiste de ce titre. L’accompagnement musical catalyse cette rencontre. Il y a de l’électricité dans l’air, littéralement, et pour cause: le groupe Les Maîtres offre deux performances époustoufflantes et inédites en guise de décor sonore!
Avant de se métamorphoser en Morse Code Transmission, Les Maîtres pressèrent trois simples, tous sur RCA. Le groupe était composé de Michel Vallée, Jocelyn Julien, Christian Simard et Raymond Roy. Ces deux derniers n’étaient pas de nouveaux venus puisqu’ils avaient aussi auparavant participé au groupe Les Pieds Nicklés. Sur disques, l’ensemble propose une pop-rock énergique et plutôt originale. Sur scène, on imagine que c’était beaucoup plus heavy, moins commercial, et c’est ce son qui fut retenu pour électrifier le discours de Gauthier. Leurs deux titres inédits à leur catalogue officiel sur 45 tours sont chantés en anglais et s’intitulent Everything can be free et Baby Yours. Une seule écoute vous convaincra et vous aussi, comme Gauthier, vous ne pourrez vous empêcher d’y aller de quelques «Wwoowowowowwww». De la dynamite! Rien ne nous prépare à une telle décharge et l’auditeur dévoué verra sa patience récompensée lorsqu’il atteindra la face B de cet album. J’en profite pour remercier les amis Marc Lambert et Satan Bélanger qui m’ont gentiment aiguillé vers cette obscurité, un album en apparence banal qui cache cette exquise perle rare. Bonne écoute! Mon père, toi t’es zoom…
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